dimanche 28 décembre 2014

Mardi du livre de décembre

Le 2 décembre dernier se sont retrouvés comme de coutume les amateurs de lecture au café, à Amiens. 


Voici le résumé des ouvrages présentés. 

Nous commençons la dernière séance de l'année avec un hebdomadaire, présenté par Geoffrey, le 1. Ce journal au format atypique (une seule très grande feuille à déplier, peu pratique pour lire dans les transports en commun, sauf à vouloir partager avec ses voisins), s'empare pour chacun de ses numéros d'un sujet, qu'il traite à travers tous les points de vues existants à son propos. Le numéro présenté par Geoffrey, le 33, traite du végétarisme. On peut y découvrir les avis d'un poète, d'un boucher, d'un philosophe, d'une anthropologue, d'un historien, d'un économiste... Le concept est intéressant, mais il faut que le sujet intéresse le lecteur pour qu'il suscite l'envie de lecture. Le 1 coûte 2,80 euros et l'abonnement 9 euros par mois. 


Daniel nous présente Plus fort que les dieux de Peter L. Bernstein. Cet ouvrage traite de la naissance de la probabilité en économie. Il ne s'agit pas d'un roman et il faut avoir quelques bases en économie. On y découvre l'histoire des grands cerveaux des mathématiques qui ont contribué à l'économie. On y apprend comment la notion de risque a donné naissance à la probabilité et aux calculs d'anticipation des risques, lesquels ont donné lieu aux assurances que nous souscrivons tous. Le livre porte à la réflexion : que peut-on anticiper/contrôler dans sa vie ?


Blandine nous présente deux ouvrages, l'un, qu'elle a adoré et l'autre détesté. Commençons par celui qu'elle n'a pas apprécié. Il s'agit d'Esprit d'hiver de Laura Kasischke. Holly, une américaine, se retrouve coincée à la maison un jour de Noël avec sa fille adoptive. Son mari parti précipitamment pour aller chercher ses parents ne peut rentrer, entre autre à cause d'une tempête de neige. Les invités se décommandent : la tempête de neige empêche toute circulation. A l'intérieur de la maison, un climat étrange s'installe. Blandine a trouvé le livre creux et insipide. Il ne se passe rien, hormis des longueurs sur la cuisson du rôti, les poules dans le jardin et les conditions d'adoption de Tatiana. Il n'y a aucune émotion dans la relation mère/fille et aucune empathie pour les personnages ne se développe chez le lecteur. D'autres romans du même auteur ont déjà été présentés lors des mardis du livre et avaient été appréciés par les lecteurs. A vous donc de vous faire une idée sur celui-ci si le cœur vous en dit. 



Blandine a adoré Jacob, Jacob de Valérie Zenatti. C'est l'histoire d'une famille juive de Constantine pendant la deuxième guerre mondiale. Jacob a 19 ans quand il doit se présenter au service militaire. Il sera formé pour libérer cette France qui est sa patrie mais qu'il ne connait pas. Parallèlement, sa famille restée à Constantine vit et attend son retour. Il s'agit d'un roman historique ou les phrases claires et concises décrivent les pensées et actions de chacun. A la fin du roman, on a envie d'en savoir d'avantage sur le devenir de la famille. On est en totale empathie envers tous les membres de la famille. L'auteur réussit très bien à allier ici les côtés romanesque et historique.




Nicolas nous présente Stigmate, les usages sociaux du handicap d'Erving Goffman. Le titre peut paraitre peu vendeur mais ce livre est extrêmement intéressant. Il s'agit du 1er tome d'une série qui traite de la façon dont on perçoit les handicaps, qu'ils soient visibles ou non. Comment réagir face aux handicaps ? Le mot stigmate vient du grec et signifie : ce qui est visible et permet de catégoriser une personne mais avec une idée négative. Un ouvrage intéressant pour qui veut s'ouvrir aux différences.





Kokoé nous parle de 50 nuances de Grey d'E.L. James. Ce roman en trois tomes, qui a connu un très grand succès, n'est pas à mettre entre toutes les mains. Il s'agit d'une histoire d'amour sur fond de sadomasochisme, à l'intrigue plutôt bien tournée. Les deux héros sont un milliardaire célibataire et une étudiante qui le rencontre à l'occasion d'une interview.

Kokoé a également adoré 1Q84 de Murakami. Ce roman fantastique en trois tomes a déjà été présenté lors du mardi du livre de septembre. Il met en scène un professeur de mathématiques et une tueuse à gages qui vont se retrouver projetés dans une année parallèle à 1984, au Japon. Intriguant et atypique, en dépit de quelques longueurs, il vaut la peine d'être découvert.


Laurent nous parle du roman qu'il est en train de lire : Karoo de Steve Tesich. Il se passe entre New-York et Hollywood, dans le milieu du cinéma. Le héros est un écrivain raté qui gagne sa vie en réécrivant des scénarios (script-doctor), il les transforme pour en faire des films grand public, c'est-à-dire des "soupes". Assez cynique, il a un fils adoptif qu'il rejette. Alors qu'il travaille sur un film, il se rend compte que l'actrice principale est la mère de son fils. Il va donc réécrire le scénario du film et de sa vie, car il tombe amoureux de cette femme. Le livre peut-être qualifié de tragicomique, avec des moments assez drôles.




Marion nous présente Les dieux voyagent toujours incognito de Laurent Gounelle. Il s'agit d'un conte philosophique. Allan, 24 ans est américain et français par sa mère. Il grandit aux États-Unis et lorsque le livre commence, il vient d'arriver en France pour un job de recruteur dans une entreprise qui veut se développer. Il n'est pas très heureux dans sa vie et suite à un chagrin d'amour, il veut se suicider en se jetant de la Tour Eiffel. Au moment de sauter, un vieux monsieur prénommé Yves lui parle et le fait changer d'avis. Il lui promet de le rendre heureux s'il fait tout ce qu'il lui ordonne. Il va lui redonner confiance en lui. Marion a trouvé ce roman, qui a eu un très grand succès, "téléphoné de bout en bout". On s'attend à tout ce qui se passe, cela ne "vole pas très haut" et le dénouement est "tiré par les cheveux". Hélas, comme bien souvent, le succès d'un livre grand public n'est absolument pas gage d'un ouvrage intéressant et réussi...


Marie présente son coup de cœur de l'année : Les cent derniers jours de Patrick Mac Guiness. Le personnage principal du roman est un jeune professeur d'anglais qui débarque en Roumanie afin d'assurer des cours à l'université de Bucarest. Il vient d'enterrer son père et souhaite commencer une nouvelle vie. Il va découvrir, et le lecteur avec lui, la Roumanie communiste. Très vite, un de ses collègues, Léo, le prend sous son aile et le guide à travers les rouages complexes de la vie sous un régime communiste, qui semble invraisemblable au jeune homme de l'Ouest qu'il est. Il voit les injustices, la promiscuité, le système sanitaire désastreux, la pauvreté, la débrouillardise, la destruction de toute liberté, la suspicion. Néanmoins, en tant qu'étranger, il est privilégié. Léo, le roi du marché noir, lui procure tout ce dont il a besoin.Ils fréquentent les milieux aisés et vont s'attirer des ennuis auprès de personnages peu recommandables. L'écriture de ce roman est magnifique et l'auteur retranscrit parfaitement le climat surréaliste et oppressant d'un régime communiste, parce qu'il a vécu lui-même en Roumanie. Une place particulière est accordée à la destruction systématique menée par Ceausescu des lieux historiques du pays pour en faire des tours bétonnées afin de raser le passé. Le livre est à la fois drôle, triste, passionnant et instructif.


Marie nous parle également de La tristesse du samouraï de Victor del Arbol. Ce polar nous fait naviguer entre plusieurs générations de personnages, entremêlant passé et présent, de 1941 aux années 1980. On y suit une femme qui tente de fuir son mari en 1941, homme politique cruel et brutal ; leurs deux garçons (de leur enfance à leur mort) ; un commissaire de police déchu et emprisonné ainsi qu'une brillante avocate de nos jours, laquelle tente d'éclaircir les liens qui existent entre tous ces personnages. Il s'agit d'une histoire dure, avec des personnages cruels et sordides, qui reflète bien l'Espagne totalitaire et son climat atroce. Des passages de tortures peuvent choquer les lecteurs sensibles. Ce livre a remporté plusieurs prix dont celui du polar européen 2012. Bien qu'il se lise agréablement, il ne s'agit pas non plus d'un roman "haletant".


Enfin, Marie conseille  Meurtre chez tante Léonie d'Estelle Montbrun, à ceux qui ont envie d'un roman sympathique pour se détendre. Il s'agit d'un policier "gentillet", à la "miss Marple", si ce n'est que l'héroïne est une jeune femme. Celle-ci est la secrétaire d'une association dédiée à Proust et doit faire face au meurtre de sa Présidente à la veille d'un colloque réunissant les passionnée de l'auteur dans la maison de son enfance. L'auteur est une américaine, professeur de littérature spécialiste de Proust. Une suite existe, intitulée Meurtre à petite plaisance.

 Rendez-vous le mardi 6 janvier 2015 à 20h, au Café !



mardi 11 novembre 2014

Mardis du livre d'octobre et de novembre



Une fois n'est pas coutume, voici le compte rendu des mardis du livre d'octobre et de novembre, avec un peu de retard. 


En finir avec Eddy Bellegueule d'Edouard Louis
Ce livre raconte l'enfance et l'adolescence d'un garçon issu d'un milieu défavorisé dans le Vimeu. Il se découvre homosexuel dans une famille où prédomine la virilité et souffre très tôt du rejet. Maltraité durant sa scolarité, il n'a pas d'amis et ne se confie à personne car il a honte. Il ne comprend pas ce qui lui arrive dans les premiers temps et essaie de sortir avec des filles. C'est la pratique du théâtre qui va en quelque sorte le sauver puisqu'elle lui permet d'entrer dans un lycée à Amiens, dans lequel il va se sentir accepté et se faire des amis. Ce livre, très poignant, fait écho au parcours de bien des jeunes homosexuels dans les campagnes. Il y a beaucoup de violence, on y découvre la pauvreté matérielle mais aussi intellectuelle, la jeunesse désœuvrée, les loisirs locaux constituant à l'ingestion de frites et d'alcool en regardant des films pornographiques. 

L'ouvrage comporte deux niveaux d'écriture représentant à la fois ce que le jeune homme pense et ce qu'il dit dans la réalité. L'auteur s'est inspiré de sa vie réelle mais signale qu'il s'agit d'un roman et non pas d'une autobiographie. Ce livre a suscité une grande polémique dans la région, et par conséquent au mardi du livre. Certains pensent que l'auteur a copié le livre de son mentor Retour à Reims, qui raconte plus ou moins la même histoire et qu'Edouard Louis a écrit ce livre pour faire parler de lui, sans se soucier du tort qu'il allait faire à sa famille, son village et sa région. Une fois de plus, la Picardie apparaît aux yeux des autres comme le théâtre de la délinquance et de la dégénérescence, ce qui est bien dommage. D'autres pensent que l'ouvrage permet de dénoncer une situation, à savoir l'homophobie et la souffrance de ceux qui en sont victimes. Pour avoir votre opinion, à vous de le lire... 



Plaintes, Ian Rankin
Ce polar se passe à Édimbourg, comme la plupart des ouvrages de l'auteur. Dans celui-ci, il inaugure un nouveau personnage, Malcom Fox, policier "bœuf carotte" comme on dit en France, c'est-à-dire de la police des polices. Ancien alcoolique, il est assez seul et ne fréquente que son père, résidant d'une maison de retraite et sa sœur, qui vit avec un loubard douteux. Il est chargé d'enquêter sur un policier soupçonné de pédophilie mais va très vite se rendre compte que cela ne colle pas avec le personnage. Parallèlement, son beau-frère est retrouvé mort et le policier chargé de l'enquête n'est autre que celui qui est soupçonné de pédophilie. Les deux hommes vont être amené à se fréquenter et vont être entraînés dans une aventure qu'ils ne soupçonnaient pas. Le roman se lit rapidement et contient du suspense.



Le quai de Ouistreham, Florence Aubenas
Ce livre est une enquête menée par la célèbre journaliste. Se jugeant déconnectée du quotidien des français car vivant et travaillant à Paris, elle décide de partir dans une petite ville avec rien et de tenter de se débrouiller. Elle veut voir de près cette "crise" dont les médias parlent sans cesse, comprendre son impact sur la vie des gens. Elle "déguise" son curriculum vitae en se gratifiant simplement d'un baccalauréat et tente de trouver du travail. Son objectif est de voir combien de temps il lui faudra pour décrocher un CDI, moment auquel elle arrêtera son enquête. Elle va donc galérer en enchainant des petits jobs de femme de ménage principalement. Elle va rencontrer de nombreuses personnes qui vont l'aider, sans rien attendre en retour, et comprendre que la très grande majorité des gens au chômage font tout pour retrouver du travail, contrairement aux idées reçues sur les chômeurs "fainéants qui vivent des allocations". Ce livre, écrit simplement, sans ajouts romancés, se lit avec grand intérêt. Il est très intéressant car il permet de montrer le courage des personnes confrontées aux difficultés financières dues à la crise. 


Bidoche, l'industrie de la viande menace le monde,  Fabrice Nicolino
Ce livre dénonce l'industrialisation de la viande. L'auteur y décrit les conditions d'élevage modernes et l'exploitation des animaux. Tous les procédés que personne ne préfère savoir afin de continuer à manger tranquillement de la viande. Personne ne peut sortir indemne de cette lecture et si vous continuez à être carnivore après cela, ou du moins à ne pas vous soucier des conditions d'élevage des animaux que vous mangez, c'est inquiétant... 


La fête de l'insignifiance, Milan Kundera
Kundera n'écrit pas de romans "romanesques" mais cherche à faire réfléchir ses lecteurs. Selon lui, la vie ne sert à rien et c'est ce qui la rend intéressante car ce que l'on fait ne portant pas à conséquence, cela nous rend libre de faire ce que l'on souhaite. Dans cet ouvrage, l'histoire est quelque peu difficile à suivre car bien qu'il n'y ait que quatre personnages principaux, d'autres personnages viennent s'y ajouter. La trame en tant que telle n'est pas vraiment intéressante mais ce sont les digressions qui la complètent qui le sont. Les personnages, hyper-réalistes, sont touchants. Il y a par exemple cette femme qui, souhaitant mettre fin à ses jours, se jette dans un fleuve. Un homme qui assiste à la scène tente de la sauver mais ce faisant se noie tandis qu'elle s'en sort. Elle va alors faire croire à tous que c'est l'homme qui souhaitait se suicider et qu'elle a tenté de le sauver. L'auteur intercale dans son œuvre des faits et anecdotes historiques qui ajoutent un côté amusant. 

Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles, Gyles Brandeth. 
Ce roman policier met en  scène le célèbre écrivain, mêlé à une histoire de meurtre. Le narrateur est un ami d'Oscar, Robert Sherard, qui l'accompagne dans ses aventures. Cet ami a réellement existé, comme le héros. On y découvre la vie de dandy que mène le héros, avec son allure extravagante, ses tenues excentriques et ses excès. L'intrigue se situe à l'époque où Wilde écrit Le portrait de Dorian Gray. Il s'agit d'un polar sympathique, sans scènes noires comme on en trouve souvent dans les polars actuels. Une lecture agréable et une plongée dans l'Angleterre victorienne. 


L'apparence de la chair, Gilles Caillot
Ce policier se différencie du précédent par son caractère sombre, ses personnages torturés et ses scènes sanglantes à ne pas aborder si l'on veut pouvoir dormir sereinement. Le personnage principal est une femme qui a été victime d'un serial killer quinze ans auparavant. Or, ce dernier revient et elle va se mêler à l'enquête... Avec un surprenant coup de théâtre à la fin - que l'on ne révélera pas ici pour les lecteurs - il fera le bonheur des fans du genre. 



mercredi 24 septembre 2014

Mardi du livre - septembre 2014



La rentrée du mardi du livre a eu lieu le 2 septembre au Café. Les participants ont exposé leurs lectures de l'été.


L’élégance du Hérisson, Muriel Barbery
Le roman se déroule à Paris, dans un immeuble bourgeois. Une adolescente de 13 ans, intellectuellement précoce, Paloma, en a assez de la vie et souhaite mettre fin à ses jours car elle se sent en décalage par rapport à son milieu. Parallèlement, Renée, la concierge, se fait passer pour une idiote auprès des habitants alors qu’elle est très cultivée, afin d’avoir la paix. Ces deux personnages se racontent au rythme d’un chapitre sur deux. On découvre également à travers elles les autres personnages de l’immeuble, présentés comme des riches égoïstes.
Geoffrey, qui nous présente le livre, trouve que les personnages sont assez simplistes et caricaturaux. Paloma est une fausse rebelle assez agaçante, alors que Renée est attachante. Le style du livre est très pompeux, comme si l’auteur avait voulu faire étalage de sa culture en utilisant des mots savants et en se référençant à d’autres auteurs. Ce livre a reçu plusieurs prix mais n’est absolument pas fascinant, une déception. 


Antéchrista, Amélie Nothomb
Victor nous présente un nouvel ouvrage de cette auteure qu’il affectionne particulièrement. Certes, elle sort un livre par an, à la rentrée littéraire, réduisant la création à une opération marketing mais ses œuvres trouvent toujours leur public. Dans celui-ci, une adolescente de 16 ans introvertie entre à l’Université. Elle rencontre une jeune fille avec qui elle se lie d’amitié. Cette dernière possède 2 facettes. L’une, candide et naïve et l’autre plus sombre. Au contact de sa nouvelle amie, l’héroïne « apprend la vie », sort de l’enfance. Cependant, elle s’aperçoit vite que sa comparse lui est devenue indispensable, sous son charme, elle ne peut plus se détacher d’elle et cela va lui occasionner des problèmes. Comme toujours avec Amélie Nothomb, l’histoire est un peu tordue et mordante, conseillée aux fans du genre. 



Mohawk, Richard Russo
Pauline a découvert cet auteur avec ce roman qui se déroule aux USA, dans une petite ville, au début des années 1970. On y suit Anne, sa famille proche et une autre famille, laquelle a un lien avec la première mais le lecteur ignore lequel. Visiblement, il s’est passé un événement grave entre les deux familles. A chaque paragraphe, on suit des personnages différents et il y a des flash-back. On rentre très vite dans leur quotidien car le livre est intéressant et bien écrit. Le sujet de prédilection de l’auteur est le déclin des USA et il est présent ici, à travers la crise que traverse l’industrie à l’époque et la découverte des premières maladies liées au tabac. 




L’insoutenable légèreté des scones, Alexander Mac Call Smith
Cet auteur écossais a déjà été présenté lors des mardis du livre. Cet ouvrage est le dernier sorti en France, suite de la série Chroniques d’Edimbourg, dans lesquelles on suit plusieurs habitants de cette ville. L’ambiance de la série reste inchangée, si ce n’est un peu plus lent. On y retrouve Bertie, l’enfant précoce qui a du mal à supporter sa mère ; l’exploratrice qui revient de son dernier voyage raté auprès de pirates (de DVD) ; le galeriste qui galère… et quasiment tous les autres. Pour les fans, l’attente a été longue car ce volume a été publié en anglais en 2010, sans traduction jusqu’ici. Un autre tome est d’ailleurs sorti depuis, espérons que la traduction sera plus rapide. 




L’amour d’une honnête femme, Alice Munro
L’auteur est canadienne de langue anglaise. Elle écrit surtout des nouvelles et a été récompensé pour cela par le prix Nobel de littérature en 2013. Marion, qui nous présente cet ouvrage, ignorait qu’il s’agissait d’une nouvelliste et a été quelque peu perturbée en constatant en cours de lecture que chaque chapitre présentait une femme, mais qu’on ne les retrouvait plus par la suite. Il y a donc ici 8 nouvelles dont les protagonistes n’ont aucun lien entre elles, à part le fait d’avoir cru au grand amour et d’avoir été déçues. Par exemple, on y trouve une femme qui est mariée à un homme insipide et n’ose pas s’avouer qu’elle fantasme sur un inconnu, ou encore une jeune fille qui se déguise en jeune mariée et dont la robe va prendre feu, la transformant en torche vivante.
A chaque nouvelle, il y a une prise de conscience, la vie d’un être qui bascule, quelque chose de nouveau qui survient… L’écriture est subtile et on ne comprend pas tout de prime abord. Il faut savoir interpréter les silences et le regard complice de l’auteur. 




En un monde parfait, Laura Kasischke
Cette romancière américaine est née dans le Michigan en 1961. Elle nous raconte ici l’histoire de Jiselle, une hôtesse de l’air trentenaire qui cherche l’amour. Un pilote d’avion veuf et père de 3 enfants, beau, riche et intelligent, que toutes les autres hôtesses convoitent, va la demander en mariage. Elle se retrouve belle-mère et les enfants sont terribles avec elle.
L’histoire, qui commençait de façon banale, connaît alors un tournant. Une épidémie de grippe mortelle envahit les USA et le pays est paralysé. Le mari est retenu en quarantaine avec son équipage en Allemagne et elle doit subvenir seule aux besoins de sa belle-famille, tout en les protégeant de l’épidémie. Les morts s’amoncellent, les USA ne gèrent plus rien, c’est une atmosphère de fin du monde.
Pour résumer, comme le dit Marion : « ça commence en Bridget Jones et ça finit comme La Route ». Un roman passionnant en tout cas, avec une écriture très maitrisée, focalisée sur les détails, les sentiments et la psychologie des personnages. 



1Q84, Murakami
Ce roman japonais en 3 tomes a connu un succès colossal dans le monde entier. On y suit deux personnages principaux, Anomaé et Tengo. La première est une professeure d’art martiaux, célibataire et solitaire. Elle a coupé les liens avec sa famille très jeune car celle-ci appartenait à une secte. Tengo est un professeur de mathématiques brillant et tente d’écrire son premier roman. Célibataire également, il fréquente un éditeur qui lui propose de travailler à la réécriture d’un roman qu’il a reçu et juge brillant mais qui manque de technique car rédigé par une jeune fille de 17 ans. Ce roman, à l’atmosphère particulière raconte l’histoire d’une petite fille en proie à des phénomènes surnaturels.
Tout au long de l’histoire, on va découvrir quel est le lien entre Anomaé et Tengo, ainsi que la part sombre de leurs personnalités. Le roman écrit par la jeune fille, intitulé La Chrysalide de l’air et « arrangé » par Tengo, est au centre de l’intrigue car les phénomènes surnaturels qui y sont décrits se passent subitement dans la réalité et viennent bouleverser la vie des personnages. Addictif, perturbant, mêlant habilement réalité et surnaturel, ce roman déstabilise le lecteur. 



Rien n’est trop beau, Rona Jaffe
Ce roman est sorti aux USA en 1958. Il raconte le quotidien de plusieurs jeunes femmes qui arrivent à New-York et trouvent un emploi de secrétaire dans une maison d’édition. Chacune différente, elles ont pourtant pour la plupart le même rêve, qui tourne à l’obsession : trouver un mari. Pour ce faire, elles fréquentent des bars, des cocktails dans lesquels elles boivent des litres d’alcool et fument un nombre incalculable de cigarettes.
Avec plus de 60 ans de recul, la lecture de ce roman laisse incrédule la jeune femme d’aujourd’hui. Les mentalités des hommes et des femmes, leurs rêves et leurs désirs ont considérablement évolués, ce dont l’on n’a pas forcément conscience. Le machisme ambiant ; la femme placée au rang de faire-valoir et de femme d’intérieur, conditionnée pour mettre au monde des enfants et confectionner des tartes ; l’insouciance quant aux dangers de l’alcool et du tabac, mais aussi la possibilité de s’élever socialement, de trouver facilement du travail dans un contexte d’essor économique, les prémices de la liberté sexuelle… Un univers méconnu qui se découvre avec plaisir dans ce roman. Le lecteur alterne entre l’envie de hurler sur ces femmes qui ne contestent pas leur condition et l’envie de connaître l’insouciance qui berçait ces dernières à qui l’avenir semblait radieux. 

 

Rendez-vous le mardi  7 septembre pour la prochaine séance !

vendredi 9 mai 2014

Mardis du livre d'avril et de mai

Comme chaque premier mardi du mois, avril et mai ont vu se réunir les amateurs de lecture au Café, à Amiens. Voici un résumé des ouvrages présentés pour ceux qui chercheraient des idées de lecture. 

Sulak de Philippe Jaenada. Blandine nous a présenté ce roman qui raconte la vie de Bruno Sulak, un homme qui a sombré dans le banditisme suite à un malheureux concours de circonstance. L'auteur, journaliste, peint le héros de telle sorte qu'il en devient attachant, d'autant plus qu'il n'utilise jamais la violence. L'ouvrage tient autant du documentaire du roman, si ce n'est plus. La lecture peut être affectée par la façon qu'à l'auteur de faire des digressions dans le récit, en racontant sa vie personnelle au moment où il écrit. Pour ceux qui connaissent la chanson de Renaud Gérard Lambert, Blandine trouve qu'elle correspond parfaitement à l'esprit du livre. 





Yeruldelgger, de Ian Manook. Le deuxième coup de cœur de Blandine est un roman policier qui se déroule en Mongolie. Plusieurs chinois et une petite fille sont retrouvés morts. Le policier chargé de l'enquête va tenter de faire le lien entre ces événements mais il est perturbé par des problèmes personnels et se voit retirer l'affaire. Il va pourtant continuer d'enquêter de son côté. Le roman est sanglant, avec beaucoup de passages difficiles. Cependant, si cela ne vous rebute pas, vous pourrez apprendre beaucoup de choses sur la Mongolie, ses traditions et la difficulté de concilier ces dernières avec la modernité. 


Le mystère d'Edwin Drood, Charles Dickens. Ce roman du célèbre auteur anglais est sa dernière œuvre. Épuisé par une tournée promotionnelle, il mourra avant de l'achever.  L'édition archi poche le présente avec une fin rédigée par Paul Kinnet, un écrivain belge né en 1915 et c'est une réussite. L'histoire se déroule dans une petite ville nommée Cloisterham. Deux orphelins, Edwin et Rosa, sont promis l'un à l'autre et s'apprêtent à se marier dans l'année mais l'arrivée de deux autres orphelins du même âge dans la ville va perturber le cours de leur vie. Edwin disparait et tout le monde tente de le retrouver. Un roman avec des personnages sympathiques et intriguant, qui tient en haleine jusqu'au dénouement.




Au bon roman, de Laurence Cossé. Deux personnages, Ivan et Francesca, décident de créer la librairie idéale. Afin de savoir quels ouvrages la constitueront, ils font appel à leurs auteurs contemporains préférés et leur demandent de leur remettre chacun une liste des meilleurs romans selon eux. Afin de garantir le secret autour du choix des ouvrages, Ivan et Francesca sont les deux seuls à connaître les noms des décideurs, lesquels ne savent pas qui sont leurs pairs. Pourtant, les auteurs sont victimes les uns après les autres d'agressions étranges... Le roman, qui débute sur les chapeaux de roues, s'avère au fil de la lecture un peu décevant mais ravira les amateurs de romans car l'on y parle longuement d’œuvres connues et du plaisir de lire.


Aimez-vous Brahms, de Françoise Sagan. Ce roman raconte la vie de Paule et Roger, un couple marié depuis de longues années et qui n'a plus grand chose à se dire. C'est l'histoire du quotidien, de la banalité qui s'installe dans tous les couples. Lorsque Paule redécore un appartement, elle rencontre un jeune homme qui devient son amant et lui redonne le goût de vivre. Le livre date de 1959 et cela se ressent par bien des aspects. Par exemple, l'auteur a tendance à "faire toute une montagne" - pour reprendre l'expression de Delphine - de la différence d'âge entre Paule et son amant, alors que de nos jours c'est banal. Il faut donc voir le livre comme un roman historique et le lire avec plaisir. 


Avec mon meilleur souvenir, Françoise Sagan. Cet ouvrage autobiographique se présente sous forme de courts chapitres, dans lesquels l'auteure présente des personnages célèbres qu'elle a côtoyé mais aussi des entités comme le théâtre ou encore la vitesse. Il se lit très vite et avec plaisir. 


Les Hauts de Hurlevent, Emily Brontë. Ce roman très sombre raconte l'histoire d'une famille sur plusieurs générations, dévorée par la haine et la rancœur. Les personnages sont assez fascinants et jusqu'à la fin on est happé par l'histoire.




Comme un trou dans la tête, Jen Banbury. Ce roman, qui oscille entre comique et désespoir, raconte les aventures d'une libraire qui voit les ennuis arriver lorsqu'elle rachète à un nain une édition très recherchée d'un ouvrage de Jack London. L'histoire se déroule à Los Angeles à un rythme effréné qui peut lasser certains lecteurs. 




Trailerpark, Russel Banks. Ce roman raconte la vie des habitants d'un camping à l'année, dans le New Hampshire. Les personnages sont tous un peu paumés et tentent de survivre aux abords d'une ancienne ville minière. Comme toujours avec Banks, les personnages sont fascinants et l'étude de mœurs élève la réflexion. 


Quelque chose à te dire, Hanif Kureishi. Ce roman se déroule à Londres, des années 1970 à nos jours. Le personnage principal, un psychiatre d'origine pakistanaise, raconte sa vie, ses doutes, ses joies et ses peines. Il est entouré de personnages assez excentriques qui donnent à ce roman beaucoup de piment. Une lecture très agréable.



lundi 17 mars 2014

Mardi du livre du 4 mars 2014

Une fois n'est pas coutume, le mardi du livre fut délocalisé chez Geoffrey, qui a eu la gentillesse de nous accueillir dans son joli appartement du centre-ville.Comme bien souvent et tout à fait par hasard, un thème s'est dégagé des lectures de chacun et a orienté le débat de la soirée : la dictature. 

Kirinyaga de Mike Resnick. Ce roman de science-fiction, présenté par Kokoé, invite à réfléchir sur les effets de la dictature. Il se déroule sur une planète imaginaire appelée Kirinyaga qui ressemble beaucoup à l'Afrique de l'est mais où la savane a disparue, remplacée par du béton. La planète est dirigée par un gourou qui a le contrôle sur les habitants, jusqu'à ce qu'une petite fille qui veut apprendre à lire remette ce monde en question. Ce roman date de 1998 mais les thèmes abordés sont toujours d'actualité.


Allah n'est pas obligé, Ahmadou Kourouma. Ce livre a obtenu le prix Renaudot en 2000. L'auteur a été tirailleur sénégalais et a écrit plusieurs ouvrages sur la colonisation et les effets de la décolonisation. Dans ce roman, il se met dans la peau d'un enfant soldat qui raconte son quotidien. Le ton est particulier car l'enfant écrit en s'aidant de dictionnaires, utilise beaucoup de proverbes. Le livre peut être utilisé comme sensibilisation contre l'exploitation des enfants soldats, cependant il n'est pas à mettre dans les mains des plus jeunes car il est assez violent. Kokoé, qui nous le présente, l'a étudié à l'école et en le relisant aujourd'hui avec du recul, s'étonne qu'il soit au programme au collège mais nous le recommande tout de même.


Petit traité de l'abandon, Alexandre Jollien. Ce philosophe a déjà été présenté aux mardis du livre. Cette fois, c'est Pauline qui nous parle d'un autre de ses ouvrages. Dans celui-ci, il apporte aux lecteurs des conseils afin d'abandonner les choses négatives, d'apprendre à relativiser. Influencé par la méditation bouddhiste et de nombreux philosophes, l'auteur présente au lecteur ses réflexions dans de petits chapitres qui se lisent rapidement. Un CD permet de réécouter à volonté.


La mort s'invite à Pemberley, P.D. James. Ce roman a pour prétention d'être la suite du célèbre Orgueil et Préjugés de Jane Austen. S'attaquer à un tel monument de la littérature est un pari risqué que, selon Pauline, l'auteur n'a pas remporté. Les personnages ne correspondent pas à ceux de l’œuvre de Jane Austen, c'est comme si leurs caractères avaient totalement changés pour que l'auteur puisse en faire ce qu'il souhaite. Mis à part cela, l'intrigue policière est très bien écrite et haletante. Les lecteurs n'ayant pas lu Jane Austen apprécieront sans doute le roman, pour les autres, il faudra oublier le premier livre. A noter, une mini série en 3 épisodes a été tirée de cet ouvrage sous le titre Death comes to Pemberley. Elle a été réalisée par la BBC en 2013.


Hunger Games Suzanne Collins. Cet énorme succès de librairie, ciblant le lectorat adolescent, est un roman de science-fiction. Il se déroule dans un monde qui a été ravagé par une guerre et recomposé en districts, géré par un capitole tout puissant. Les districts sont à la merci du capitole, la population est enfermée dans des sortes de camps et souffre, notamment de la faim. Chaque années, des jeux sont organisés et les districts doivent fournir des adolescents qui vont se combattre à mort dans une arène. Avec cet ouvrage, la discussion revient autour de la dictature et de la façon dont on peut tenir le peuple par "le pain et le cirque" pour paraphraser Paul Veyne ; ou encore sur la répression. Les films qui ont été tirés des 3 tomes sont épurés par rapport aux ouvrages, lesquels sont bien plus violents et dont la lecture n'est pas recommandée aux plus jeunes.


Olive Knitteridge Elisabeth Strout. Ce roman a reçu le prix Pulitzer en 2009. Son originalité réside dans le fait que l'héroïne, Olive, n'est jamais le centre de l'histoire : elle ne fait que passer dans la vie des autres personnages que l'on suit. Il y a donc pour chaque chapitre un personnage principal différent dont on suit un moment de la vie et où Olive fait une apparition. Le roman est magnifiquement bien écrit et superbement orchestré car malgré la multitude de personnages, l'on ne s'y perd pas.


La chambre des vies oubliées, Stella Duffy. Ce roman se déroule à Londres. Robert est un vieil homme qui cherche un repreneur pour son pressing. Akel, jeune homme d'origine pakistanaise, répond à l'annonce passée par Robert et va passer un an au pressing à apprendre le métier. Les deux hommes vont apprendre à se découvrir alors qu'ils évoluent dans deux mondes différents et ont des opinions et des parcours à l'opposé. Chaque chapitre présentant la connivence qui s'installe entre les deux est alterné avec un autre, où l'on suit des clients du pressing dans leur vie quotidienne. On découvre Londres, les différents milieux sociaux qui y vivent, les préoccupations de la société actuelle et les petits secrets de Robert. Un beau roman contemporain qui plaira d'autant plus aux amoureux de Londres.


Prochain rendez-vous le mardi 1er avril (et ce n'est pas une blague...) au Café, 17 rue Flatters à Amiens, à 20h.